Mentions légales également obligatoires en Suisse à partir du printemps

Mentions légales également obligatoires en Suisse à partir du printemps

Intervention de Martin Steiger, avocat

Martin Steiger Martin Steiger · Medienrechtsanwalt

A partir du printemps 2012, une obligation générale d’insertion de mentions légales s’appliquera en Suisse pour le « commerce électronique », avec comme trame de fond la révision de la loi fédérale contre la concurrence déloyale (LCD), qui entrera en vigueur le 1er avril 2012.

Dans le cadre de cette révision, la LCD sera complétée par le nouvel article 3, paragraphe 1, alinéa s suivant :

«Agit de façon déloyale celui qui, notamment, omet, en offrant par la voie du commerce électronique des marchandises, des œuvres ou des prestations, d’indiquer clairement son identité et de fournir les coordonnées complètes d’une adresse de contact, y compris celle du courrier électronique.»

Cette nouvelle obligation générale d’insertion de mentions légales se fonde sur les dispositions correspondantes de la Directive européenne sur le e-commerce, mais n’en reprend que certaines parties.

Champ d’application de l’obligation d’insertion de mentions légales


La LCD englobe en principe tout comportement d’une personne qui est susceptible d’influencer la concurrence (c.-à-d. l’offre et la demande). Peu importe qu’il s’agisse d’un comportement privé ou commercial. En ce qui concerne les offres en ligne telles que les sites Internet, il est important (1) qu’elles soient accessibles au public et (2) que leur contenu ou le comportement connexe puisse influencer la concurrence, en raison de l’existence (3) d’une référence à une activité économique, y compris de tiers. Le caractère « professionnel » ou « commercial » d’un site Internet n’est pas d’une importance capitale eu égard à la législation en matière de concurrence déloyale.

Le « commerce électronique » (e-commerce) englobe toutes les formes de communication servant à proposer des marchandises, des œuvres ou des prestations et à promouvoir de telles offres par voie électronique. Les formes courantes d’une telle communication sont Internet et les sites Internet, mais d’autres formes entrent également en ligne de compte, comme par exemple les sites Internet mobiles, les applications natives pour les smartphones ou les réseaux sociaux (social media). L’offre de marchandises englobe par exemple la vente d’objets tels que des livres ou des accessoires informatiques, la proposition d’œuvres, la rédaction de textes ou la conception de sites Internet, et l’offre de prestations, l’exécution de mandats tels que des services de consulting et de traduction. Le e-commerce peut également comprendre la publication de contenus.

L’utilisation d’hôtes ou de noms de domaines étrangers ne dispense pas de la nouvelle obligation d’insérer des mentions légales. Toute personne tenant par exemple un blog suisse chez « Blogger », Tumblr ou WordPress.com tombe également sous le coup de l’obligation d’insérer des mentions légales.

Les offres exclusivement privées, intellectuelles, scientifiques ou internes d’une organisation ou d’une entreprise ne sont pas considérées comme du e-commerce. En tant qu’exceptions quant à l’obligation d’insérer des mentions légales dans le e-commerce, la LCD révisée définit la téléphonie vocale, l’échange direct de courriers électroniques et autres formes de communication individuelle comparables.

Mentions légales également obligatoires en Suisse à partir du printemps

Contenu des mentions légales


Les mentions légales doivent indiquer clairement l’identité complète ainsi que les adresses de contact du prestataire, y compris ses adresses e-mail. Aucune obligation légale n’impose de les intituler « mentions légales », mais cela est toutefois recommandé. Une telle désignation ainsi que le positionnement usuel en pied de page (footer) d’un site Internet facilitent le repérage des mentions légales.

Les indications sur l’identité du prestataire doivent être claires et exhaustives. Selon moi, elles englobent notamment les éléments suivants :

L’indication d’une adresse postale ou la possibilité de communiquer par courrier électronique exclusivement par le biais d’un formulaire de contact ne suffit pas. Les indications ayant trait à l’identité doivent être publiées directement sous forme de texte et pas seulement sous forme d’image. La protection contre les spams ne doit pas être assurée par des adresses e-mail « masquées » ou incomplètes au détriment d’indications claires conformément à la législation.

La Directive européenne sur le e-commerce mentionnée plus haut prévoit d’autres indications, entre autres d’éventuels numéros de registre du commerce et de TVA, des autorités de contrôle compétentes dans le cadre d’activités avec obligation d’autorisation et d’éventuelles associations professionnelles et réglementations professionnelles dans des métiers réglementés. Du point de vue des nouvelles obligations d’insertion de mentions légales, de telles indications ne sont pas juridiquement obligatoires en Suisse.

Sanctions juridiques


La LCD prévoit des sanctions civiles et pénales en cas d’infractions à la nouvelle obligation d’insertion de mentions légales. En cas de concurrence déloyale intentionnelle, la LCD prévoit sur requête des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans ou des amendes allant jusqu’à 360 fois le taux journalier en vigueur. En cas d’omission intentionnelle des mentions légales, les peines encourues devraient cependant varier sensiblement.

Le système juridique suisse ne prévoit aucun rappel à l’ordre payant avec déclarations d’omission sous peine d’amende.

Recommandations


Je préconise en tant que règle générale pour l’ensemble des sites Internet et autres offres en ligne (c.-à-d. y compris pour les blogs « privés ») la publication d’indications claires et exhaustives sur l’identité et les adresses de contact. Ces indications doivent être intitulées « mentions légales » et inclure un lien sur l’ensemble des pages d’un site Internet.

La question de savoir si un site Internet relève du champ d’application de la LCD et du « commerce électronique » doit faire l’objet d’une étude au cas par cas. La LCD révisée ne contient en fin de compte aucune indication, le Secrétariat d’Etat à l’économie compétent (SECO) n’a publié jusqu’à présent aucune recommandation correspondante et il n’existe encore aucun cas de jurisprudence spécifique. Les mentions légales allant déjà de soi aujourd’hui pour une offre en ligne sérieuse, une telle étude ne devrait cependant pas s’avérer nécessaire pour la plupart des sites Internet.

En ce qui concerne les offres en ligne telles que Twitter, qui n’offrent aucune possibilité directe d’insérer des mentions légales, je recommande un lien hypertexte correspondant. Selon moi, un lien hypertexte vers un site Internet propre suffit dans la mesure où les mentions légales y sont faciles à trouver.

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